Murielle Michetti-Baumgartner , Visage n° 4, de la série Opaque, 2005 © Murielle Michetti-Baumgartner, Collections Photo Elysée

« Flou, une histoire photographique »

Sous le commissariat de Pauline Martin, Photo Elysée à Lausanne dédie une exposition au flou dans la photographie. 

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Avez-vous déjà considéré une photo comme ratée parce qu’elle était floue ? Ou au contraire, vous êtes-vous déjà ému devant le flou artistique d’une photo ? Le flou, défaut ou recherche esthétique ? Si l’on regarde l’histoire de la photographie, les deux ! Et même plus encore. La nouvelle exposition du musée Photo Elysée à Lausanne nous présente avec brio le flou dans la photographie, ses valeurs et ses différentes fonctions au fil du temps. Un sujet fort intéressant où l’on découvre la force expressive du flou, de l’invention du médium à notre époque contemporaine. Le flou n’est pas naturel en photographie comme il l’est physiologiquement pour notre œil, il peut résulter d’une erreur, d’une manipulation voulue ou fortuite. C’est ainsi que dès les débuts de la photographie, le flou joue différents rôles : tantôt recherche artistique ou technique, tantôt défaut voire accident. Sa perception évolue en fonction des époques, des pratiques et des cultures. Chronologique et thématique, l’exposition classe ainsi ces variations en 12 catégories, du flou pictural puis pictorialiste quand la photo devait imiter la peinture, médium encore sacré à la fin du XIXe siècle, aux flous scientifique, amateur, commercial et expérimental en passant par le flou de mouvement et le flou au cinéma. Le flou de la modernité et celui de la photographie contemporaine clôturent l’exposition, à travers notamment le photojournalisme et l’émergence des appareils photo « de terrain » type Leica dont le flou authentifie la véracité des images prises sur le front, ou encore l’apparition du pixel avec la photographie numérique. 

Le flou n’est pas naturel en photographie comme il l’est physiologiquement pour notre œil, il peut résulter d’une erreur, d’une manipulation voulue ou fortuite.

Ce voyage dans l’histoire de la photographie nous montre à quel point le flou en a finalement toujours fait partie, et de quelles façons il nous invite à voir le monde et à le saisir. Riche en références, l’exposition réunit 180 artistes photographes dont entre autres Eugène Atget, Alfred Stieglitz, Man Ray, Henri Cartier-Bresson, Willy Ronis, William Klein, Thomas Ruff ou encore Sarah Moon. Mis en résonnance avec le flou d’autres médiums comme la peinture et la sculpture, le flou photographique est ici le témoin d’avancées techniques et scientifiques, mais aussi un outil d’expression artistique et de recherche graphique. Ses valeurs n’ont cessé de s’inverser et de se succéder à la fois, lui conférant un rôle prépondérant dans la photographie. 

Par les différentes formes qu’il prend (…) le flou raconte cette inlassable nécessité d’empoigner par la représentation un réel qui ne cesse d’échapper à la compréhension, d’en manipuler l’apparence, voire la matière, pour tenter de dire comment on voit ou ce que l’on sent – même quand cela ne se voit pas. 

Pauline Martin, commissaire de l’exposition

Crédit photo : Murielle Michetti-Baumgartner , Visage n° 4, de la série Opaque, 2005 © Murielle Michetti-Baumgartner, Collections Photo Elysée


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