© Marisa Howenstine

À nos nounous

Et comme disent les jeunes, cœur sur vous.

C’est la semaine de la Petite Enfance et aujourd’hui, j’ai envie d’écrire non pas au sujet de nos chers et tendres chérubins, mais plutôt à propos de celles (et parfois ceux, bien moins nombreux) qui les gardent toute la journée quand on travaille : les nounous. La nounou ou la nany, c’est le mot passe partout et familier que l’on utilise pour nommer celles qui prennent soin de notre progéniture en notre absence. Mais attention, il s’agit d’un vrai métier.

Auxiliaire de puériculture, agent de petite enfance ou assistante maternelle, cela dépend du niveau d’étude et de si la personne travaille en crèche ou à son compte depuis son domicile ou chez les parents. J’aimerais ici parler de ce que je connais, du moins que j’expérimente depuis que je confie moi-même ma fille à ces professionnelles : les auxiliaires de puériculture en crèche.
J’aimerais en parler, j’aimerais plutôt leur rendre hommage. Oui, pour une fois, parler de l’importance de leur présence et de celles qui ont à cœur de bien faire leur métier. Non pas des horreurs qui ont tristement fait l’actualité dernièrement, du scandale du business des crèches qui consiste à accueillir un maximum d’enfants pour un maximum de profits, au détriment de la sécurité et du bien-être de l’enfant en passant par les histoires ineffables de maltraitance et d’infanticide. Non. Cette fois, j’aimerais simplement exprimer mon plus profond respect et ma gratitude envers ces femmes — car ce ne sont pratiquement que des femmes — qui sont les garantes de la sécurité mentale et physique de nos enfants pendant que nous allons nous-même au charbon. Ces femmes restent auprès de nos enfants toute la journée, sans relâche, sans ciller, c’est leur métier. Et il faut le dire, il est parfois ingrat ce métier. Soyons honnêtes, en tant que parents, l’on sait ce que ça donne quand le petit a faim, soif, la couche sale, le copain qui a tiré sur son doudou ou qui lui a piqué son jouet, ça chouine, ça pleure, ça hurle et c’est insupportable. À la maison, on a ça en une fois, en double parfois en triple. Elles, c’est fois 20 en moyenne. Et tous en même temps s’il vous plaît. Vous me direz elles l’ont choisi, encore une fois c’est leur métier. Certes, mais un peu d’allocentrisme, ça ne fait pas de mal. Ces femmes sont des exemples de patience et de résistance. Qu’on ne me fasse pas croire que ce métier ne se fait pas par vocation, moins que par choix et encore moins par motivation financière. On touche ici au fond du sujet : comment se fait-il que celles qui prennent soin de nos enfants, pendant que nous travaillons à faire tourner la machine géante au service du capitalisme libéral et de la sainte nation, soient payées à peine quelques euros au dessus du SMIC ? Encore une fois je parle ici de ce que je connais, à savoir les salaires pratiqués en crèche municipale, donc publique. Comment se fait-il que celles qui prennent soin des travailleurs de demain au service des travailleurs d’aujourd’hui, ne soient pas considérées en terme de salaire comme de véritables maillons indispensables à la société ? Au même titre que les aides soignantes et les infirmières par exemple. Est-ce parce que le niveau d’étude est bas ? Est-ce parce que, osons le dire, ces métiers restent une histoire de bonnes femmes ?

Comment se fait-il que celles qui prennent soin des travailleurs de demain au service des travailleurs d’aujourd’hui, ne soient pas considérées en terme de salaire comme de véritables maillons indispensables à la société ?

Prendre soin de nos enfants, les sécuriser et les occuper tout au long de la journée quand les parents ne peuvent pas le faire, ou pire, quand la société les empêche de le faire — 2 mois et demi de congé maternité en France, après c’est retour au turbin obligatoire si tu ne veux pas perdre ton salaire et ton job — ne mérite pas un peu plus de reconnaissance salariale ? Au moins plus que le SMIC ? Au mieux qu’un travailleur du tertiaire qui établie un power point sur l’évolution de la consommation des déodorants et shampoings secs depuis leur mise sur le marché ? Ou de toute tendance marketing qui pourrait inciter à acheter un énième produit dont nous n’avons pas besoin et qui de toute façon sera obsolète la semaine prochaine ? Je n’ai absolument rien contre les travailleurs du tertiaire, l’étant moi-même, et encore moins contre ceux qui font du marketing, mais clairement, concrètement, peut-on revoir nos priorités ?
Peut-on admettre que ces femmes sont de véritables care givers, des donneuses de soin, et que pour réaliser les tâches qui nous incombent quand nous sommes nous mêmes adonnés à d’autres tâches dans nos travails respectifs, elles méritent une meilleure considération salariale ? Peut-on enfin respecter ceux qui prennent soin des nôtres ? Les petits et les grands. Les malades et les fragiles. Les jeunes et les vieux. Pour une fois, ne pas baser le revenu sur un niveau d’étude, une pratique intellectuelle ou une quelconque accessibilité de savoir mais sur la valeur humaine du travail effectué, et plus encore : sur son impact au long terme. Des enfants qui évoluent dans des environnements sains sont des enfants qui généralement auront confiance en eux, et pourront à leur tour faire tourner la société, si possible dans le bon sens et au service — attention élan utopiste — d’idéaux collectifs et bienveillants.
Sans partir à l’extrême, prenons juste le temps de reconnaître que l’on a besoin d’elles et qu’elles méritent elles aussi des salaires décents.

Pour une fois, ne pas baser le revenu sur un niveau d’étude, une pratique intellectuelle ou une quelconque accessibilité de savoir mais sur la valeur humaine du travail effectué, et plus encore : sur son impact au long terme.

J’aimerais saluer Sarah, Sylvie, Oumou, Julia, Claire, Anne, Maxinne, Justine, Sylvie, Nhu et Geneviève pour leur patience, leur douceur et leurs conseils parfois. Sans oublier Noëla en cuisine qui réussi à faire manger des kilos de sardines et de légumes verts à ma fille, et peut-être bientôt à mon fils.
Merci pour votre travail si précieux.

Crédit photo : © Marisa Howenstine


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